L’homme qui peignait les âmes – Metin Arditi

Ce roman, c’est l’histoire d’un coup de foudre. Le mien. .Pour cette histoire, pour la plume de l’auteur, pour le personnage principal. Metin Arditi, auteur que je n’avais jamais lu, a touché mon âme d’une façon extraordinaire.

Car tout est inhabituel dans ces pages. Mais commençons par le début avant que je m’éparpille sous l’enthousiasme de cette lecture. Je vais structurer cet article en 3 points.

L’époque

L’histoire commence en 1078 à Acre, petite ville d’Israël à environ 150KM de Jérusalem. En pleine période des croisades, alors que des hommes ont décidé que leur foi était la seule à avoir. Alors que pour un Dieu, ils enfreignent toutes les valeurs qu’ils ont apprises. Pour amener tout un peuple dans l’amour et la foi, ils vont torturer, effrayer et tuer.

L’histoire

Avner est un adolescent juif vivant à Acre issu d’une famille de pêcheur. Lors d’une livraison au monastère, il entend des chants venant de l’église. Bien que cela lui soit interdit par sa religion, il entre. Il sera subjugué par les icônes. Pour celles-ci, il va tourner le dos à tout ce qui bâtissait sa vie.

 Il ne s’agit pas d’un portrait mais d’un objet sacré, lui dit le supérieur du monastère. On ne peint pas une icône, on l’écrit, et on ne peut le faire qu’en ayant une foi profonde

Très bien ! S’il faut être chrétien pour « écrire » des icônes, alors Avner sera Chrétien! Commence sa conversion par le baptême puis tous les enseignements chrétiens. Bien entendu, Avner ne s’en vente pas vraiment auprès des siens.

Anastase, le père du monastère va lui apprendre tout ce qu’il sait sur l’écriture des icônes. Jusqu’au jour où l’élève dépasse le maitre. Avner doit partir pour d’autres lieux. Avec l’aide d’un marchand musulman, Avner quitte une famille qui vient de la renier pour compléter sa formation.

Avner va parfaire son talent, son art. Car il faut bien appeler un chat un chat, Avner est talentueux, mais à cette époque les artistes n’existaient pas.

Il n’y avait pas que les prêtres chrétiens qui avaient décidé de tenir l’homme en servitude. Les Juifs et les Musulmans savaient, eux aussi, soumettre les leurs. Jusqu’à interdire la représentation d’un papillon, sous prétexte qu’il pourrait devenir objet d’idolâtrie… Ou plutôt, source de joie, et porter ombrage à leur toute-puissance.

Si lui-même avait été chassé de Mar Saba, c’était parce que ses planches dévoilaient la tromperie des icônes, qui se voulaient incarnation de la divinité, une sorte de pourboire à l’homme, alors qu’elles n’étaient qu’une ruse pour le maintenir en soumission.

Le message

Plus que l’histoire de cet enfant, c’est surtout son message qui m’a ému. Avner est né juif, puis il s’est converti au christianisme pour enfin partager la communion musulmane avec son ami marchand.

Plus que la religion, il voit et aime les autres. Il est profondément humain. Et par cette vision non obscurcie par la religion, il soigne l’âme des Hommes.

Il faut tout faire avec distance. Regarder avec distance, pour avoir une vue d’ensemble. Aimer avec distance, pour laisser l’autre s’épanouir. Se fâcher avec distance, pour ne jamais être prisonnier de sa propre colère.

Un magnifique roman qui a donc plusieurs lectures. Une véritable aventure, une immersion historique et une histoire humaine.

Quatrième de couverture

Acre, quartier juif, 1078. Avner, qui a quatorze ans, pêche avec son père. À l’occasion d’une livraison à un monastère, son regard tombe sur une icône. C’est l’éblouissement. « Il ne s’agit pas d’un portrait mais d’un objet sacré, lui dit le supérieur du monastère. On ne peint pas une icône, on l’écrit, et on ne peut le faire qu’en ayant une foi profonde ».

Avner n’aura de cesse de pouvoir « écrire ». Et tant pis s’il n’a pas la foi, il fait comme si, acquiert les techniques, apprend les textes sacrés, se fait baptiser, quitte les siens. Mansour, un marchand ambulant musulman, le prend sous son aile. C’est l’occasion d’un merveilleux voyage initiatique d’Acre à Nazareth, de Césarée à Jérusalem, puis à Bethlehem, jusqu’au monastère de Mar Saba, en plein désert de Judée, où Avner reste dix années où il devient l’un des plus grands iconographes de Palestine.

Refusant de s’astreindre aux canons rigides de l’Eglise qui obligent à ne représenter que Dieu et les saints, il ose reproduire des visages de gens de la vie ordinaire, cherchant dans chaque être sa part de divin, sa beauté. C’est un triomphe, c’est un scandale. Se prend-il pour un prophète ? Il est chassé, son œuvre est brûlée. Quel sera le destin final d’un homme qui a osé défier l’ordre établi ?

Le roman de l’artiste qui, envers et contre tous les ordres établis, tente d’apporter de la grâce au monde.

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